Comment les chevaux arabes ont-ils été perçus en Occident ?

(See the comments section below for a translation of this blog entry to English)

A l’origine, en tant qu’améliorateurs des races locales, essentiellement en vue de fournir des produits pour le service de la guerre. La base de nombreux élevages a été les animaux pris dans les combats contre l’Empire Ottoman. Il en est résulté dans de nombreux pays une jumenterie plus ou moins pure que l’on a tenté de conserver par l’achat d’étalons importés d’Orient. 

La Hongrie avec la race Shagya a été éminemment honnête.

La France, avec deux variétés régionales, le Tarbais et le cheval du Limousin a eu la même démarche. A partir de Napoléon III, le pays a cherché à se constituer une jumenterie pure (Asil) afin de pouvoir disposer de reproducteurs pour améliorer la race Barbe en Afrique du nord et perfectionner l’Anglo-arabe naissant. Les établissements les plus remarquables ont été Tiaret en Algérie, Sidi Thabet en Tunisie et Pompadour en France. C’est à partir de cette époque que l’on s’est rendu compte de la différence de qualité entre les produits de la métropole et ceux des deux autres établissements (dégénérescence rapide sous l’influence des sols et du climat).

Entre les deux guerres et surtout après la seconde guerre mondiale, la sélection des chevaux arabes s’est faite sur le critère de la course plate sur courte distance et sous poids léger.

Evidemment dans ces conditions, l’Arabe se montrait moins rapide que l’Anglais. La tentation de la fraude (saillie de la jument Arabe par un étalon Anglo-arabe, voir Anglais) était alors très grande. On peut affirmer qu’elle fut même institutionnalisée par les Etats. Elle s’est déroulée avec tant d’ampleur et d’une façon si évidente qu’un certain nombre d’éleveurs, dont Robert Mauvy, protestèrent vivement, mais en vain. L’administration des Haras, qui avait la haute main sur le choix des étalons, tenta de les faire taire en leur imposant pour leurs juments des étalons notoirement impurs. Il y eu donc dans les années 1960 et 1970 des pressions très fortes, entre autre sur Robert Mauvy et Jean Deleau, pour leur imposer des étalons de l’Etat, condition sine qua non pour pouvoir ensuite utiliser leur propres étalons (Aguet, Saadi) ou les étalonsde l’élevage Cordonnier (Irmak, Iricho, Inshallah) qui venaient d’arriver. 

Dès 1973 le show fit son apparition de façon prééminente. Les qualités physiques des chevaux devinrent immédiatement secondaires. Pour vendre, il fallait produire « des champions » afin de suivre la mode et mieux encore, de la créer. Tous ceux qui ont des notions de marketing savent ce que cela signifie. Sauf que cela n’a rien à voir avec l’élevage, ni même avec l’équitation.

Le premier cheval de selle du monde était devenu une poupée de chiffon.  Devant ces dérives continuelles, Robert Mauvy avait élaboré une doctrine d’élevage afin de conserver la race dans son intégrité physique et morale, pendant quelques générations, en dehors du berceau de race (cette doctrine sera bientôt publiée par notre association).

 On peur la résumer en trois points :

1)    Monte régulière des juments poulinières et entrainement du poulain dès l’âge de 6 jours derrière sa mère, et jusqu’au sevrage.

2)    Entrainement de jeunes chevaux pour une épreuve de 3000 mètres en terrain libre et sous poids minimum de 75kg

3)    Epreuve de sélection des reproducteurs sur 10000 mètres dans les mêmes conditions.

Avec cette méthode, on peut espérer conserver le cheval Asil pendant environ trois générations. Ensuite l’emploi de reproducteurs en provenance du berceau de race est une nécessité absolue, sous peine de dégénérescence complète.

Je terminerai cette petite introduction rapide par trois citations que Robert Mauvy aimait rappeler :

La première est la lettre de l’Emir Abdel Kader à Napoléon III, accompagnant le cheval Emir, offert comme présent : « Je t’envoie le plus beau, le plus pur, le plus vaillant cheval que j’ai rencontré dans ma vie. Il s’appelle Emir. Si tu veux le garder en bonne santé et surtout si tu l’emploies à perpétuer sa race, fait lui chasser la gazelle deux fois par semaine. »

« Le cheval de Pur sang arabe est fait pour porter lourd, vite et loin …et continuer »

Enfin la dernière citation qu’il tenait lui-même des bédouins Ruwalah: « Le cheval de Pur sang arabe est le cheval de l’homme, le cheval de course est cheval du diable »

Jean-Claude Rajot

14 Replies to “Comment les chevaux arabes ont-ils été perçus en Occident ?”

  1. MY ROUGH TRANSLATION OF RAJOT’S ARTICLE INTO ENGLISH

    How have Arabian horses been perceived in the West?

    In the beginning, Arabians were used to improves local breeds, mainly to provide remounts for the cavalry in times of war. The basis of many national breeding programs were animals that had been taken in combat against the Ottoman Empire. In many countries this has resulted in herds of more or less pure broodmares which breeders tried to maintain through a constant infusion of stallions imported from the East.

    Hungary with its Shagya race was very honest. France took the same approach, with two local breeds, the Tarbais and the horse from Limousin, heavily supplemented with Arabian blood . From the time of Napoleon III onwards, France has sought to establish a pure breeding program (Asil) to improve the Barb breed of North Africa and develop its own emerging Anglo-Arab. The most remarkable studfarms were Tiaret in Algeria, Sidi Thabet Pompadour in Tunisia and France.

    It is since this time that we became aware of the difference in quality between Arabian horses bred in mainland France and those of two other studs (rapidly degeneratng under the influence of soil and climate).

    Between the two world wars and especially after the Second World War, the selection of Arabian horses was done on the criterion of short distance racing carrying light weight. Obviously in these conditions, Arabian horses were less fast than English Thoroughbreds. The temptation to cheat (mating Arabian mares with Anglo-Arab stallions, if not English Thoroughbreds, and register the get as Arabians) was enormous. It can be argued that such behind the scences cross-breeding even became a state policy.

    This cheating happened with such magnitude and was so obvious that a number of breeders, including Robert Mauvy, protested strongly, but in vain. The administration of the French government studs, who had the upper hand on the choice of government owned and privately owned stallions, tried to silence these purist breeders by imposing the use of notoriously impure stallions on their pure mares.

    In the 1960s and 1970s there was a lot of pressure on breeders like Robert Mauvy and Jean Deleau to use the government stallions, a sine qua non condition so that they be allowed to use their own stallions or the Cordonnier stallions that had just come from Tunisia.

    As of 1973, Arabian horse shows became prominet. The physical qualities of Arabian horses immediately became secondary. To sell, one had to produce “champions” to follow the fashion of the moment, and better yet, to create it. All those who have marketing basics know what that means. Except that this approach has nothing to do with breeding, let alone with horsemanship. The best riding horse in the world had become a rag doll.

    Given these continuing abuses, Robert Mauvy had developed a breeding doctrine to keep the Arabian breed in its physical and moral integrity, for several generations, outside the cradle of race (this doctrine will soon be published by our association).

    One can summarize this doctrine in three points:

    1) Riding broodmares regularly, and training the foals since the age of six days oldwhen behind their mother until weaning

    2) Training young horses for 3,000 meter races in open terrain and under a minimum weight of 75kg

    3) Test fure breeding stallion on 10,000 meters in the same conditions.

    With this method, it is hoped that Asil horses can be kept for about three generations. Then the use of stallions from the cradle of the breed becomes an absolute necessity, to avoid complete degeneration.

    I conclude this short introduction with three quick quotes Robert Mauvy loved to recall:

    The first from Emir Abdel Kader of Algeria in a letter to Napoleon III that came with the stallion Emir, which Abdel Kader offered to Napoleon III: “I’m sending you the best, the purest, most gallant horse that I met in my life. He is called Emir. If you want to keep him healthy, and especially if you use him to perpetuate his breed, make him hunt gazelle twice a week. ”

    “The purebred Arabian horse is made to carry heavy, fast and far and to keep doing so …”

    The last quote Mauvy heard himself from Ruwalah Bedouins “The Asil Arabian horse is the horse of the Arab, the race horse is the horse of the Devil”

    Jean-Claude Rajot

  2. Un grand merci jean Claude pour cettemagistrale introduction dans le blog d’Edouard ,si je peut ajouter quelque chose :l’ancienne epreuve de selection d’etalons utilisee par Marbach peut aussi servir.
    Quand aux suggestions de feu M.Mauvy elles sont appliquees dans la Jezireh Syrienne dont les chevaux ont ridiculises les chevaux des Maktoum dans les epreuves d’endurance en Syrie,enregistrants des temps ahurissants ,mais etant disqualifies pour manque d’experience des cavaliers Bedouins.(notre ami pure man va m’accuser de faire la publicite pour les chevaux Syriens!)

  3. Bravo pour cette belle introduction!
    Joe, auriez vous les références de la course dont vous parlez et des photos de ces chevaux Syriens en endurance, merci bcp…

  4. Je vais essayer de me procurer les photos a Syrian Association Arab Horse SAHA.
    les courses d’endurance sont halucinantes en Syrie ,il y a 15 jours a eu lieu sur la cote pres de l’antique cite d’Ugarit une course :Plage/ montagne de 60 km avec un parcours commencant sur la plage puis une escalade de 20km environ puis plaine puis plage.le temps imparti pour le troncon montagne etait de 5 heures car la pente etait assez forte avec des pierres et un ravin ,un ami a trouve de la difficulte pour la monter a moto :le premier la parcouru en 90 minutes (de la folie pure) et son cheval etait en parfait etat et a put continuer et a gagner la course.
    les chevaux gagnants des 6 premieres places sont tous eleves, entraines et montes par les Bedouins de la Jezirah. (si tu as envie de le traduire en Anglais et le poster SVP fais le car je suis fatigue merci)

  5. Bonjour,

    Très intéressant Mr Rajot.

    En consultant différents vétérinaires par rapport à l’influence du climat sur les chevaux, il s’avère que les effets d’un climat sec ou humide n’ont aucun effet sur les performances du cheval.

    Ils y auraient cependant une différence sur la physiologie des chevaux qu’ils ne sauraient déterminer avec exactitude.

    Mais ils insistent sur le fait que cela n’influe en rien rien les performances…

    Je me permets de reprendre certains points :

    Citation :

    “1) Monte régulière des juments poulinières et entrainement du poulain dès l’âge de 6 jours derrière sa mère, et jusqu’au sevrage.”

    Comment voyez-vous cet entraînement ? Pouvez-vous détailler ?

    Il semblerait que d’après les nombreux vétérinaires que j’ai contacté dernièrement, un entraînement sur des poulains de cet âge nuirait à leur bon développement et pourrait les mettre hors d’état de servir.

    Comment voyez-vous également l’entraînement des autres chevaux préparés pour 3 et 10 km ? Pouvez-vous détailler ?

    Citation :

    “Avec cette méthode, on peut espérer conserver le cheval Asil pendant environ trois générations. Ensuite l’emploi de reproducteurs en provenance du berceau de race est une nécessité absolue, sous peine de dégénérescence complète.”

    J’ai également considéré l’avis des vétérinaires. Ils m’ont clairement expliqué que la retrempe (tel que vous le voyez) n’a aucun effet sur les produits issus de cette retrempe.

    Pour conclure, je pense qu’il est judicieux de comprendre la source exacte de cette citation :

    “Enfin la dernière citation qu’il tenait lui-même des bédouins Ruwalah: « Le cheval de Pur sang arabe est le cheval de l’homme, le cheval de course est cheval du diable »

    Pourquoi les Ruwallah ont-il affirmé cela ?

    Les courses de chevaux engendrent souvent le principe du pari. En Islam, le pari est formellement interdit. Le Prophète Mohammed (paix et bénédiction sur lui) a cité les chevaux soumis à ce genre de course comme étant les propriétés du diable.

    Je confronte en toute simplicité les avis vétérinaires récents aux principes d’élevages empiriques (ne voyez là aucun sens péjoratif). Ce qui est intéressant, c’est de voir que deux courants s’opposent diamétralement.

    J’ai besoin d’en savoir plus.

    Cordialement,

    Karim

    1. Peut-etre. Ceci dit, les Bedouins Ruwalah au temps ou cette citation a ete rapportee (debut du 20eme siecles) n’etaient pas de pieux musulmans. Loin de la.

  6. Au temps de l’émir Abdel Kader, le général Daumas, nous rapporte une analogie. A cette époque aussi, globalement, les nomades du Sahara n’étaient pas de pieux musulmans.

    En effet dans les sociétés nomades, ils conservaient une grande partie de leurs traditions. C’est ainsi par exemple, que dans bon nombre de tribus bédouines d’arabie ou du sahara, nous retrouvions des amulettes et autres porte-bonheurs au cou des chevaux, et j’en passe…

    Ceci constitue, selon l’Islam un pêché majeur.

    L’islam a tout de même transmis certaines choses qui ont perduré…

  7. Votre question est vaste…

    En toute honnêteté, je pense que le cheval asil n’a de sens que dans la recherche de la performance physique. Il doit être sobre, résistant, rapide et endurant, à l’image de ses nobles ancêtres.

    Les lignées que l’on voit aujourd’hui dite Asil en occident n’ont strictement aucun intérêt à mes yeux. Ils ont certainement une bien meilleure traçabilité que la plupart des chevaux arabes, mais cela ne suffit pas pour fabriquer un cheval de qualité.

    A ce propos, je préférerais nettement un cheval de lignée russe ayant eu de bonnes performances, qu’un cheval asil qui n’a jamais rien fait.

    Pour moi, la logique d’élevage de la race arabe est très simple :

    Le lignage et la performance

    C’est le judicieux mélange de ces deux éléments qui fera le bon cheval. Je pense que l’environnement a une grande importance, bien que les avis vétérinaires disent le contraire. Mais mon sentiment à ce sujet me mène à penser le contraire…

    Je pense que ce qui va être déterminant, au delà de la race, ceci étant uniquement du ressort de l’entraîneur/éleveur, ce sera la capacité à l’élever et à l’entrainer pour qu’il libère le maximum de son potentiel.

  8. Karim,
    Vous avez raison, le lignage ne suffit effectivement pas. Je pense moi aussi que la performence est aussi importante que les lignées.

    Karim,
    You have right,the origin by itself is not enough.
    I agree with You,the achievement is important too.

  9. Kiraly,

    C’est pour cette raison que je pense qu’être éleveur est une lourde tâche lorsque nous voulons promouvoir la race en bonne et due forme, non pas pour se pavaner dans des shows comme l’a très bien souligné l’auteur du sujet.

    Maintenant, la véritable question est celle-ci :

    Comment doit-on élever le cheval arabe ? L’entraîner ? en un mot, le promouvoir.

    Edouard,

    Pouvez-vous répondre à ma question précédente ? Vous ne l’avez pas vu ?

  10. Edouard,
    C’était juste par politesse que j’ai répondu a Karim en français, car en fait je ne parle pas le français ; c’est ma fille qui m’aide car elle l’apprend. Et tout cela parce qu’une petite histoire vécu en France m’est venu dans les pensées: j’ai essayé de me renseigner en anglais et on m’a presque toujours répondu en français.

    Karim, you’re questions are very good.

    Best wishes from Hungary,

    László

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